Comment expliquer le divorce à un enfant de 3 ans ?

Google+ Pinterest LinkedIn Tumblr +

Les numéros ne sont pas d’appel : un couple sur trois se sépare, et la moitié de ces couples ont au moins un enfant à charge. Chaque année, près de 200 000 enfants sont séparés de leurs parents. Mais cette fréquence ne devrait pas faire oublier que pour un enfant la séparation de ses parents est un bouleversement complet.

« Pourquoi suis-je là ? »

Séparation des parents ? C’est un « tsunami », un « monde d’effondrement »… Pour nous faire comprendre ce qui se passe dans le corps et le cœur d’un enfant lorsque ses parents annoncent leur séparation, les professionnels n’y vont pas quatre chemins. timide, comme pour nous convaincre qu’il est moins terrible qu’ils disent, nous insistons encore : « Même si ses parents ont souvent argumenté ? » , « Même si cela se passe bien ? ». Oui. Même si.

A lire aussi : Top 5 de cadeaux à offrir à son amoureuse

Autant que ne pas avoir Veil le visage : quand ses parents se séparent, quelle que soit la situation et même si la vie à la maison était l’enfer, l’enfant vit quelque chose de très difficile. Pourquoi ? Parce que l’enfant n’est plus en mesure, soudainement, de répondre à la question « Pourquoi suis-je ici ? » , explique Véronique Herlant, psychologue à Lyon. La rencontre — quelles que soient les conditions — entre ses parents, dont il est le fruit et qui justifie sa présence, a perdu son sens. Pour retrouver sa place, pour reprendre pied , « il faudra que l’enfant mette ce trou qui s’ouvre, redonner un sens ». Et ça prend du temps.

« Est-ce pour toujours ? »

La profondeur de la blessure est telle que l’enfant essaie de l’obstruer avec espoir que ses parents se rétabliront ensemble. Même un enfant qui dit : « J’ai bien compris que c’est pour toujours » cultive cette croyance. Certains adultes témoignent également de combien de temps ils ont vécu avec cette idée.

A lire aussi : Comment calculer le partage des vacances scolaires ?

De même, l’enfant croit inévitablement que tout cela est de sa faute. « L’enfant doit se sentir coupable  », affirment les auteurs de Une semaine chez Papa, une semaine chez Maman’s, Claire Wiewauters et Monique Van Eyken. Il est confronté à une décision à laquelle il ne peut rien changer et dans laquelle sa voix ne compte pas. Dire que c’est de sa faute, complète Véronique Herlant, c’est « reprendre, être acteur de ce qui se passe, prendre place dans la scène qui joue. C’est mieux que de se sentir séparé. »

Il appartient aux parents de dire que leur décision est « grande entreprise ». Sans crainte de se répéter, comme le souligne Raphaël, un père séparé : « Nous avons dû répéter à notre fille les éléments sécurisants, lui raconter l’amour qu’on a pour elle, et qu’elle ne perdra aucun de ses parents. Il est important de bien distinguer la relation parent-enfant de la relation entre les deux adultes.

L’ entourage proche, les grands-parents peuvent également jouer un rôle important, de sorte que l’enfant ne se sent pas seul devant l’énigme de la séparation de ses parents. Si le milieu familial est bouleversé, la maison des grands-parents peut fournir une havre de paix pour l’enfant, tant qu’ils s’abstiennent de participer au conflit.

Soyez attentif aux réactions de votre enfant

Ce que l’enfant éprouve n’est pas toujours vu. Alors que certains enfants réagissent très fortement à l’annonce de la séparation de leurs parents (physiquement et verbalement), d’autres n’expriment pas leur réaction. « Elle n’a pas réagi », ont dit les parents, enfermés. Nous nous sommes même demandé si elle avait entendu. C’est « comme si rien ne s’était passé »… du moins à la surface. Mais le corps a d’autres langues.

Véronique Herlant reçoit souvent des enfants en consultation pour des « symptômes » : cauchemars fréquents, retour du pipi au lit, difficulté à se séparer en entrant dans la classe ou en allant à la nounou… Ces troubles peuvent être des écho de la relation entre les parents . L’enfant peut également réagir avec un décalage dans le temps. Coralie en témoigne : deux ans après la séparation de ses parents, sa fille a commencé à faire des reproches très durs à sa mère.

Un enfant a déjà connu des séparations

« J’ai halluciné sur l’adaptabilité de ma fille  ! Je l’ai trouvée super forte dans cette épreuve », dit Raphaël, en admirant, sans s’aveugler sur les « moments de chagrin intense qu’elle traverse ».

Dans sa vie, un enfant a déjà connu des séparations. Tout d’abord, sa naissance, qui l’a arraché du cocoon confortable de la poitrine maternelle, puis les premières séparations de la vie quotidienne : aller à la nounou, à l’école, pour aller chez les grands-parents… L’enfant sait quelque chose sur la douleur, le refus de se défaire. « Tout ce matériel lui sera utile, explique Véronique Herlant, en venant à résonner avec ce qu’il doit vivre. Nous aimerions tous l’harmonie, mais nous constatons que la réalité est insuffisante et quenous devons constamment nous adapter . L’enfant est dans ce travail depuis sa naissance. »

se comporter comme un adulte

Bien sûr, une séparation conflictuelle est plus difficile à vivre qu’une séparation où chaque parent entretient un lien constructif avec l’autre. Pour y arriver, Claire Wiewauters et Monique Van Eyken suggèrent aux parents d’adopter le point de vue de l’enfant en essayant de voir la situation « à travers ses yeux ».

Des parents qui ont témoigné de leur séparation, deux sont professionnellement confrontés à des déchirures conjugales . L’un travaille dans la police, l’autre intervient auprès des familles, à la demande du juge de la famille. Et ça a joué la façon dont ils abordent leur affaire personnelle : « Je suis flic, et je peux vous dire que je vois des enfants qui mordent. Et dans tous les horizons de la vie. Je voulais éviter cela à ma fille à tout prix. » Comment ? En se comportant comme un adulte.

« Le comportement adulte, explique Véronique Herlant, c’est, par exemple, prendre suffisamment de hauteur pour ne pas interpréter comme un rejet de sa personne les manifestations de la colère, la tristesse, la dépression ou le rejet qui peuvent être l’expérience de l’enfant. » Alors, face à un enfant qui dit : « Je ne veux plus te voir », c’est à l’adulte de ne pas répondre au même niveau, évitant de se répliquer, en colère : « Je ne veux pas non plus te voir » ou « Tu verras, je te forcerai à le faire ». Un autre cas classique : l’enfant, qui a clairement identifié les idéaux éducatifs des deux, souligne volontiers : « Chez Papa, nous mangeons de la pizza tout le temps » ou « Chez maman, je peux regarder la télévision comme je veux ». Mieux vaut ne pas s’engloutir dans les reproches indignés mais abréger en disant plutôt, comme Raphaël : « Ah, eh bien, c’est cool, la semaine prochaine, tu peux le faire alors ! » Et expliquer sans crainte de répéter qu’il y a des règles différentes chez maman et papa.

Enfin, tout cela participe à la même attitude, que Chloé résume bien, qui a entretenu une bonne relation avec son ex : « Je pense que nous nous sommes trouvés intéressés au point de avoir un enfant ensemble. Nous devons garder cela en mémoire. » Respectez et faites confiance à son ex-partenaire. « Même si c’est difficile, même si tout se mélange dans notre tête, conseille Pauline, nous devons nous forcer à faire la distinction entre l’ex-amant et le parent de notre enfant . Cet événement peut aussi être l’occasion de commencer ou d’approfondir le travail personnel qui nous aidera, nous et nos enfants.

Témoignages de parents

Clémence« Je me suis séparé du père de mon fils quand il avait 3 ans. Aujourd’hui, il en a 7. Nous l’avons annoncé ensemble, nous avions beaucoup pensé, et notre souhait principal était de le rendre coupable . Je ne sais pas ce qu’il a compris de cette conversation. Il n’a pas pleuré et n’a pas montré d’émotion particulière. Nous sommes tous les deux enfants de parents divorcés, et cela nous a donné une sensibilité particulière à ce qu’il pourrait ressentir et aux questions qu’il pourrait avoir. En général, nous avons une bonne relation parentale. D’ailleurs, parfois nous tous trois d’entre nous déjeunent.

Coralie« Ma fille avait 2 ans quand on s’est séparés. Elle a eu le temps de ressentir le désaccord entre nous. À l’époque, elle n’avait aucune réaction particulière. Aujourd’hui, elle a 5 ans, et elle me renvoie que je suis le méchant, que son père est triste à cause de moi, que j’ai brisé sa famille. C’ est dur. Son père a beaucoup de mal à accepter cette séparation. La communication entre nous est très conflictuelle. Nous n’avons pas les mêmes exigences sur le cadre, les horaires : l’écart est grand et c’est difficile pour elle. Le jour de la transition, en particulier… »

Pauline « Mon fils avait 15 mois quand nous nous sommes séparés. A chaque étape, on lui a dit ce qui se passait, mais ce n’était pas un échange : il était encore trop jeune pour cela. Aujourd’hui, il a 3 ans, et il pose beaucoup de questions : pourquoi papa et maman ne vivent pas ensemble ? Pourquoi n’est pas l’amant de papa maman ? Nos réponses ne devraient pas lui suffire, parce qu’il continue à demander ces questions. Par exemple, quand je lui dis que nous nous battions trop, il dit : « Ne discutez pas. » Entre mon père et moi, ça se passe très bien : on a réussi à faire la différence entre l’ex et le parent, et c’est la chose principale. »

Raphaël« Nous nous sommes séparés il y a un an, quand notre fille avait 4 ans. Cela aurait pu être contradictoire, mais la présence de l’enfant nous a contraints à nous prendre sur nous et à maintenir un discours d’une seule voix. En termes de maturité, elle est très forte. J’étais très en colère, mais j’ai immédiatement identifié son pouvoir de nuisance, et l’ai mise de côté afin qu’elle n’affecte pas ma relation avec mon enfant. Ce n’est pas simple : il faut gérer le chagrin, le chagrin d’une certaine représentation de la vie familiale, et renouveler votre relation avec votre enfant.

Livres pour aller plus loin

Avec les enfants

Sur mon fil, par Séverine Vidal et Louis Thomas, Milan, 13,90€.

La grande aventure du Petit Tout, par Agnès de Lestrade et Tiziana Romanin, Sarbacane, 15,50€.

Mon père et ma mère se séparent de Sophie Furlaud et Laurent Simon, Casterman, 10,90€.

Pour les adultes

Une semaine chez Papa’s, une semaine chez Maman’s, Comment aider votre enfant, par Claire Wiewauters et Monique Van Eyken, De Boeck, 19,95€.

« Quand les parents se séparent », supplément pour les parents du magazine Pomme d’Api, n° 639, mai 2019. Texte : Anne Bideault. Illustrations : Pascal Lemaître. Chiffres : (source INSEE, 2015)

  • Voir le résumé du magazine Apple d’Api de mai 2019

Partager.